Reddition de comptes, compensation et protection
À l’égard de leurs biens familiaux, les conjoints et les conjoints de fait ont chacun droit à une reddition de comptes et, s’il y a lieu, à une compensation, et ils peuvent en demander l’exécution au tribunal, au besoin.
Qu’est-ce qu’un élément d’actif familial?
Un élément d’actif familial est un bien qui, selon la Loi sur les biens familiaux, est utilisé à des fins familiales, comme le logement, le transport ou les loisirs.
Voici quelques exemples :
- le foyer familial;
- l’ameublement;
- la voiture familiale;
- un chalet;
- les comptes d’épargne, comptes chèques ou comptes courants (pourvu qu’ils servent à des fins familiales);
- les droits découlant d’une police d’assurance vie, d’une police d’assurance accidents et maladie ou d’une rente;
- les régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER).
Tout bien familial qui n’est pas un élément d’actif familial est un élément d’actif commercial. En voici quelques exemples :
- des intérêts dans une entreprise, par exemple une pharmacie, une entreprise de construction, un cabinet de médecin ou d’avocat;
- une police d’assurance vie ou d’assurance accidents et maladie souscrite dans le seul but de couvrir les pertes qu’une entreprise pourrait subir du fait du décès ou de la maladie de l’assuré.
Du fait de sa nature, une ferme est à la fois un élément d’actif familial et un élément d’actif commercial.
La maison de ferme et la portion des terres agricoles nécessaire à sa jouissance sont considérées comme le foyer familial, donc un élément d’actif familial. Le reste de la propriété agricole peut être considéré comme un élément d’actif commercial.
Qu’est-ce que la reddition de compte et la compensation des actifs?
Une reddition de comptes comprend la préparation d’une liste complète des biens et des dettes par chaque conjoint ou conjoint de fait. La liste doit indiquer la valeur de chaque actif et le montant de chaque dette à la date de la séparation. Si le conjoint ou le partenaire ne fournit pas volontairement une telle liste, le tribunal peut l’ordonner.
Qui détermine la valeur totale et la part égale?
Le tribunal détermine ensuite la valeur totale de l’actif dont chaque conjoint ou conjoint de fait doit ainsi rendre compte. Les dettes ou le passif sont soustraits de l’inventaire total des biens, à moins que les dettes ne soient relatives à des biens exemptés ou que cela ne donne un résultat négatif. Le tribunal fixe alors le montant que le conjoint ou le conjoint de fait détenant la plus grande valeur d’actif doit verser à l’autre à titre de compensation pour que le partage des biens soit égal. Le tribunal ne divise pas les éléments d’actif eux-mêmes. Toutefois, il peut ordonner que la propriété d’un bien soit transférée d’un conjoint ou d’un partenaire à l’autre pour acquitter un paiement de compensation.
Dans certains cas, le tribunal peut ordonner le partage inégal des biens. Cela est décidé en partie selon que les biens sont des éléments d’actif familial ou des éléments d’actif commercial. Le tribunal ne peut ordonner un partage inégal des éléments d’actif familial que s’il conclut qu’un partage égal serait extrêmement injuste en raison de circonstances extraordinaires. Les juges ont un peu plus de pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne les éléments d’actif commercial, mais seulement s’ils ont conclu que le partage égal serait manifestement inéquitable.
Quelles sont les échéances légales pour le dépôt d’une demande de reddition de comptes et de compensation?
Lorsqu’un tribunal a accordé un divorce et que la question des biens familiaux n’a pas été réglée, l’un ou l’autre des ex-conjoints peut demander au tribunal de réaliser une reddition de compte et de compenser les actifs. Cette demande doit être présentée dans les 60 jours suivant la prise d’effet du divorce. Dans le cas des conjoints de fait qui ont enregistré leur union de fait auprès du Bureau de l’état civil, l’un ou l’autre des conjoints peut présenter au tribunal une demande de reddition de comptes et de compensation des éléments d’actif. La demande doit toutefois être faite dans les 60 jours suivant la date d’enregistrement de la fin de l’union auprès du Bureau de l’état civil. Les conjoints de fait qui n’ont pas enregistré leur union doivent présenter leur demande dans les trois ans qui suivent la date de leur séparation.
Le comportement a-t-il une incidence sur la façon dont les biens sont partagés?
Lorsqu’il décide s’il y a lieu de partager inégalement les biens, le juge ne peut pas tenir compte de la conduite ou des actes des conjoints ou conjoints de fait, à moins que cette conduite représente de la dilapidation, et donc qu’elle ait gravement menacé la sécurité financière de la famille.
Par exemple, si l’un des conjoints ou conjoints de fait a fait un don d’une valeur excessive à un tiers, le tribunal en tiendra compte pour réduire la part de ce conjoint, pourvu que l’autre conjoint ou conjoint de fait ait demandé le partage des biens familiaux au plus tard deux ans après avoir découvert ce don. Le partage inégal des éléments d’actif familial ou commercial est très rare.
Quel est l’impact de la faillite sur le partage des biens familiaux?
La dissolution des liens de famille s’accompagne souvent de difficultés financières. Si le conjoint ou le conjoint de fait n’est pas en mesure de payer ses dettes, il peut envisager de faire une cession en faillite. Un syndic de faillite prend alors possession des biens de la personne en faillite et répartit le produit de ces biens entre les créditeurs acceptés de la personne. Certains biens sont exempts de la répartition.
Une faillite peut avoir de graves répercussions sur le partage des biens entre conjoints ou conjoints de fait. En vertu d’une décision rendue par la Cour suprême du Canada en juillet 2011, un conjoint ou un conjoint de fait qui a été libéré de la faillite est dégagé de la réclamation de son conjoint ou conjoint de fait au titre de la compensation en ce qui concerne les biens familiaux. Une réclamation au titre de la compensation est une dette comme les autres et un failli est libéré de cette dette lorsqu’il est libéré de la faillite.
Peut-on protéger les biens familiaux avant qu’ils ne soient partagés?
Le conjoint ou conjoint de fait qui demande au tribunal de procéder au partage des biens familiaux peut également lui demander de rendre une ordonnance pour assurer leur conservation. Une telle ordonnance empêche l’autre conjoint de détruire les biens, de les vendre, de les donner de façon irresponsable, ou de les transporter hors du Manitoba avant que le tribunal ait statué sur leur partage.